Roxanne rentrait tout juste de Birmingham. En fait, cela faisait quelques jours qu’elle était arrivée à Monaco, plus précisément Monte-Carlo pour présenter comme il se doit son fiancé à ses parents. Il avait d’abord refusé de revenir en France, puis finalement, il avait compris que c’était important pour Roxanne de revenir ici. Sa vie était ici, sa famille, ses amis. Tout. Elle avait tout abandonné en partant quelques années plus tôt pour avorter. Mais elle n’avait pas eu le choix. Pour la réputation de ses parents, ceux-ci avaient racontés qu’elle était partie vivre quelques mois chez de la famille en Angleterre pour prendre l’air. C’était la version officielle. Quand à la véritable version, Roxanne avait été contrainte de faire ce qu’on lui demandait. Elle était dévastée, mais ça, personne ne l’avait vu. Personne ne l’avait su. Difficile donc de revenir dans cette ville qu’elle aimait tant et qui l’a vu grandir… et pourtant, elle était bien là. Roxanne n’avait pas encore eu l’occasion de sortir, seule, pour admirer ce paysage qui lui avait tellement manqué. C’est pourquoi ce matin, elle avait décidé de prendre l’air. Vraiment prendre l’air, pas pour faire semblant. Elle ne demanda l’autorisation à personne, après tout elle était majeure et vaccinée, puis tôt le matin, sortit du château. Le château. Son habitation, sa demeure. Cela pouvait paraître impressionnant mais pourtant, ça ne l’était pas. Roxanne était une fille vraiment ordinaire malgré ce que l’on pouvait penser d’elle, lorsque l’on ne la connaissait pas. Elle enfila une veste, direction le port de Fontvieille où elle avait l’habitude de venir avec sa petite sœur pour se balader. Très vite, elle se retrouva à observer les bateaux qui allaient embarquer ou encore ceux qui restaient là, qui ne partaient jamais. Elle avait toujours rêvé partir en mer, armée du minimum. Elle aurait pu, mais jamais personne ne la laisserait faire. Sa mère aurait trop peur et son fiancé ne serait pas d’accord. En plus, ce n’était pas son genre à lui le bateau. Loin de là. La fraîcheur du Rocher ne donna qu’une envie à Roxanne : prendre un café. Elle s’arrêta donc dans l’un des cafés du Port puis s’installa en terrasse, attendant que l’on vienne lui proposer une carte. Elle s’assied, puis regarda aux alentours. Il y avait une jeune femme qui se trouvait là, à quelques pas. Une silhouette familière, encore plus lorsqu’elle se retourna vers la blonde. Roxanne s’exclama en souriant : « Brenny ? » Elle n’était pas sure d’elle, mais quand même, elle lui ressemblait tellement. « Brenny c’est bien toi ? » demanda Roxanne en se levant pour la rejoindre à sa table.

En ce moment, il fallait le dire, Roxanne ne se sentait pas très bien. Elle était heureuse de revenir à Monte-Carlo, de revoir sa famille et ses amis, mais le comportement de son fiancé l’inquiétait étrangement. Elle ne voulait pas croire qu’il ne l’aimait plus ou qu’il avait une maîtresse, juste qu’il passait une mauvaise passe, que tout cela allait s’arranger au plus vite. C’est pourquoi elle avait décidé de prendre l’air. L’air de la mer, du port, était le meilleur endroit pour se vider la tête et les esprits. Elle n’avait laissé aucun mot à personne, était partie comme une voleuse du manoir. Mais de toute façon, elle serait rentrée dans une heure grand maximum ; pas sure que quelqu’un remarquerait son absence. C’est ainsi qu’elle se retrouva sur la terrasse de ce café, à attendre qu’on veuille bien lui apporter la carte de ce qu’offrait en petit-déjeuner cet endroit. Croyant ensuite reconnaitre une amie d’enfance, ou plutôt de lycée, Roxanne se mit presque à crier, vérifiant l’identité de la jeune brune qui se trouvait sur une table à côté. Elle se leva même pour la rejoindre quand la demoiselle lui répondit finalement : « Oui... oui c'est moi ! Roxanne, ma petite voisine de casier ? » Roxanne n’en revenait pas. Brenny n’avait pas changé. Du moins physiquement. Elle était toujours cette jolie brunette qu’elle avait adorée auparavant. « C’est bien ça ! Je suis contente de te revoir ; et aussi que tu te souviennes de moi ! Ca fait quelques années quand même… » dit-elle en repensant à cette époque du lycée. Une époque qu’elle regrettait parfois, voire même souvent. Une époque où les petits problèmes ne se transformaient pas en énormes. Durant quelques temps, Roxanne servit de guide à la jeune lycéenne perdue qu’était Brenny en première année. « Depuis quelques jours ! Comment est-ce que tu vas ? » Brenny avait certainement du entendre les dires de la famille De Cardaillac lorsque Roxanne était partie en Angleterre. Pour tout le monde, elle avait décidée elle-même de partir, de prendre l’air, après sa rupture avec Romain. Ce qui s’avérait faux évidemment, chose que personne hormis la famille De Cardaillac elle-même ne savait. « Tu n’as pas changé ! Qu’est-ce que tu fais maintenant ? » Brenny était la première personne du passé de Roxanne qu’elle retrouvait ici…

Roxanne ne se remettait pas de cette rencontre. En fait, en revenant à Monaco, elle ne s’attendait pas à retrouver des amis de lycée, comme Brenny. Heureusement, elle n’était pas encore tombée sur son ex. Il ne fallait pas parler trop vite évidemment… Retrouver Brenny faisait énormément plaisir à la blonde qui avait longtemps appréciée cette jeune femme souriante et pleine de vie. Brenny était certainement l’une des seules personnes à traiter Roxanne comme l’une des siennes. Quand la demoiselle était arrivée au lycée, la première année, tous l’avait traité de snob et ne voulait pas lui parler. Mais Brenny était différente. Peut-être parce que c’est Roxanne qui avait fait le premier pas ? Elle n’en savait rien, mais une chose était sure, le destin pouvait parfois être vraiment très agréable. « Ça va ! Et toi comment tu vas depuis tout ce temps ? » Ces temps-ci, Roxanne détestait cette question. En fait, elle faisait comme si tout allait bien, alors que son couple connaissait des difficultés et qu’elle remettait en question quelques décisions du passé. « Je dirais que ça va. Dans l’ensemble. Revenir à Monaco est certainement la meilleure décision que j’ai prise depuis des années ! » dit-elle avec enthousiasme, cachant tout de même un mal être certain. Roxanne prit vite des nouvelles de Brenny. Elle voulait savoir comment elle allait, ce qu’elle était devenue. C’était tellement étrange de se revoir ainsi qu’elle voulait tout savoir, maintenant. La curiosité était l’un de ses nombreux défauts, elle devait l’avouer ! « Je suis maître nageuse et rien de plus... pas de mari, aucun enfant, ma vie était bien plus palpitante au lycée ! » Le lycée… ce temps-là était révolu. Ce que Roxanne avait le don de regretter, surtout depuis quelques mois. La remarque de la belle la fit quand même sourire. Pas de mari, pas d’enfant. Ce n’était pas son cas, et pourtant, elle ne pouvait n’avouer qu’une partie de sa vie, l’autre étant bien cachée au plus profond d’elle-même. « Maître nageuse ? C’est sympa comme métier ! Je n’ai jamais été bonne nageuse moi tu sais… » dit-elle en repensant aux années de sport qui l’avaient faite souffrir à l’adolescence. Ce n’était certainement pas le sport de prédilection de Roxanne. Aucun ne l’était en fait. « Et toi alors tu fais quoi maintenant ? » La question de Brenny eut le don de la faire douter un instant, de la mettre mal à l’aise. Celle-ci la destabilisa même, alors que Roxanne était pourtant bien entraînée à mentir, depuis tout ce temps. « Oh bien, en ce moment, je ne fais pas grand-chose… Je suis revenue il y a quelques jours pour présenter mon fiancé à mes parents. Tu sais comment ça se passe chez nous. Il faut l’approbation de Monsieur et Madame pour épouser un homme. En fait, je n’ai pas continué mes études, après le bac. Mais je ne cherche pas vraiment de travail non plus » dit-elle à son amie. Brenny connaissait Roxanne. Elle connaissait sa famille et son niveau de vie. Elle savait que Roxanne n’avait pas à travailler pour subvenir à ses besoins. L’argent des Cardaillac suffisait largement à la nourrir toute sa vie. « L’Angleterre était sympa, mais je suis contente d’être de retour » Ainsi, elle allait pouvoir communiquer plus facilement avec la famille de son enfant. Enfant encore inconnu aux yeux de tous puisque mort pour la plupart des autres. « Mais toi alors ? Ta vie doit être beaucoup plus passionnante que la mienne ! » ajouta t’elle en souriant. Parler d’elle n’avait jamais été son fort…