« Elly ! Andy ! Venez manger ! Marissa vous attend pour servir le dîner. » Les deux jolies blondinettes jouaient à cache-cache dans le vaste jardin de la demeure familiale. Alors qu’elles avaient toujours rêvé d’avoir un bungalow en bord de mer ou une cabane en bois perchée dans un arbre pour jouer, elles prenaient plaisir à profiter de ce vaste espace. Les petits sapins, les pensées, les lilas, les hortensias, les glycines, les clématites et tellement d’autres fleurs parsemaient le parc des Ladurée, le rendant aussi beau et majestueux qu’un jardin public. L’argent était en abondance dans la famille depuis que le grand-père avait créé une entreprise immobilière s’étant avérée très fructueuse. « Elly ! Dépêche-toi ! Le jeu est terminé, Papa nous a appelées pour aller manger… » Elisheva n’en avait que faire, elle voulait continuer de jouer quitte à ce que son père vienne lui botter les fesses pour ne pas avoir obéi. Sa sœur attendit pendant cinq bonnes minutes. « Bon Elly, je rentre, moi ! » Ah bah sympa la grande sœur ! Elle n’avait pas vraiment le goût du risque il fallait croire. Elly s’asseya dans l’herbe ce qui n’allait pas manquer de tâcher sa robe immaculée. Elle s’amusait à arracher des marguerites et à jouer à « Je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie et pas du tout ». En bref, ce à quoi beaucoup de gamines jouent. D’un coup, on entendit un fracas. C’était la porte de la maison qui claquait. Elly se contente de grimacer sans pour autant bouger. « Elisheva Pimprenelle Ladurée, si tu ne rappliques pas dans deux minutes, tu seras privée de poney pendant deux semaines et je te laisserai dormir dehors. Comme ça, les serpents viendront t’attaquer ! » Le père appuya ses poings sur ses hanches quasi-certain que sa petite fille allait rappliquer sous ses menaces. Et, il avait tout à fait raison. « Je suis là, papa. » Elisheva se leva et rejoignit son père à toute hâte. Arrivée à sa hauteur, elle lui prit la main et lui offrit son plus beau sourire. Ça marchait à tous les coups !

« Elly, Elly, t’es dans ta chambre ? » « Oui, vas-y, monte. » Rangeant en toute hâte sa chambre, Elly préparait l’arrivée de son amie. Elle refusait de passer pour plus bordélique qu’elle ne l’était. Sa meilleure amie s’approcha d’elle, lui claqua deux bises et s’asseya sur le lit à ses côtés. « Tu vas bien ? » « Ouais, comme d’habitude. Mes parents me cassent le dos. J’dois dire que j’en ai un peu marre. Mais bon, j’peux pas foutre le camp. J’ai pas d’argent. Tout appartient à la famille. » Elle insista sur cette dernière phrase en grimaçant. C’est cool de faire partie d’une famille de riches mais quand vos parents font les difficiles pour vous donner de l’argent de poche du haut de vos seize ans, ça paraît vite insupportable. « Apprends à leur demander pour sortir plutôt que de faire le mur et ça ira mieux ! » Elly soupira, comme si elle n’avait que cela à faire. Bref. « Dis, ça te dit de venir à la soirée chez Chris ce soir ? » « Ouais, tant qu’il y a quelqu’un pour me ramener… Il est hors de question que j’appelle ma mère pour venir me chercher. » « Bah écoutes, mon frère vient aussi donc il nous emmènera et nous ramènera. » « Okay, ça marche. » « Super. Et demande à tes parents cette fois. » « Ouiiiiiiii ! Rooooh ! » Sa meilleure amie éclata de rire et fichut le camp de la maison des Ladurée. Ainsi, sa meilleure amie ne comprendrait donc jamais qu’il lui était impossible de demander à ses parents d’aller en soirée. Elle était persuadée qu’ils lui diraient non, surtout après les quelques conneries qu’elle avait déjà fait. Toutefois, Elly osa pour la première fois consulter l’avis de ses parents. Elle alla dans le salon où ils discutaient, se posa sur le canapé en face d’eux et commença. « Voilà, il y a une soirée chez Chris ce soir et j’aimerais y aller. » Ses parents la regardèrent avec de gros yeux. Il y a de quoi être étonné puisqu’elle n’est jamais foutue de demander habituellement. « D’accord. » Elly regarda son père, interloquée puis esquissa un sourire. Elle quitta la pièce sans les remercier de quoi que ce soit. La soirée se passa très bien. Elisheva découcha contrairement à ce qui était prévu. Ce fut lors de cette soirée qu’elle rencontra Marvin avec qui elle sortit pendant les deux plus belles années de sa vie.

« Tu seras avocate ou médecin, Elly. Comme ta soeur. » La jeune Elisheva ne put se retenir d'éclater de rire face à la révélation de son père. Elle avait rompu avec son petit-ami il y a peu. Elle tentait de sauver les apparences et prétendait que tout allait bien. Il était maintenant temps de choisir son cursus universitaire. Elly avait fait son choix mais elle se doutait parfaitement que ses parents n'approuveraient pas. Ou plutôt que son père ne la supporterait pas dans sa décision. « Ouais et Andy est malheureuse comme un chien. Elle a une belle carrière, elle est mariée à un riche et elle n'est pas heureuse du tout. Encore une fois, ça prouve que les mariages arrangés et te laisser choisir nos études, ce n'est pas forcément une bonne chose. » « Elisheva ! » Elle soutint le regard de son père, elle ne s'écraserait pas pour cette fois. C'était bien trop important pour qu'elle le laisse décider de SA vie. Mme Ladurée posa sa main sur la cuisse de son époux pour l'apaiser et l'empêcher de sortir de ses gonds. « Elly a raison. En quelque sorte. C'est de son avenir dont il s'agit, nous devrions la laisser en décider, tu ne crois pas ? Peut-être qu'elle n'a pas si mal choisie. Que voudrais-tu faire, ma chérie ? » Un large sourire prit place sur son visage, masquant son air de défi d'il y a quelques secondes. « J'aimerais faire des études de cosmétologie. » « Il ne manquerait plus que ça. Et tu vas apprendre quoi ? A maquiller les gens ? » Elly éclata de rire de plus belle. « Papa, ce sont des études de cosmétologie, pas de cosmétique. Je vais apprendre à créer du maquillage, à doser les composants et tout ça... Tu sais à quel point j'aime la mode et le maquillage. Ce serait presque chimiste. Ce serait génial, ne crois-tu pas ? » Elisheva marqua un temps d'arrêt, cherchant un soutien en regardant sa mère. Cette dernière lui sourit et elle comprit qu'elle la soutiendrait, ce qui la rassura. « C'est tout aussi prestigieux qu'avocate ou médecin. Ça prouvera qu'une "gosse de riches" peut être habile de ses mains et pas nunuche comme on en croise parfois. » Son père sembla réfléchir mais Elly voulait y croire, ou plutôt, elle en rêvait. « C'est d'accord. Je compte sur ton investissement personnel et rends-nous fiers, ma chérie. » Elly poussa un léger cri, tellement elle était heureuse puis fit un câlin à ses parents. Son père s'était montré compréhensif pour la première fois depuis longtemps et ça lui faisait énormément de bien.